Les Français partagent le constat d’une société fracturée

Les Français dressent le portrait d’une société divisée

66% des personnes interrogées considèrent que ce qui divise les Français aujourd’hui est plus fort que ce qui les rassemble, contre 33% qui sont d’un avis contraire, des chiffres stables depuis octobre 2021.

Un pessimisme majoritaire dans toutes les catégories de population et électorats, à l’exception des 18-24 ans (51% ce qui rassemble est plus fort, 48% ce qui divise est plus fort) et dans une moindre mesure des électeurs d’Emmanuel Macron (44%, 56%) qui sont plus partagés.

« Aujourd’hui, on vit côte à côte. Moi je crains que demain, on vive face à face » : 83% des Français partagent ces mots prononcés par Gérard Collomb

83% partagent cette inquiétude prononcée par Gérard Collomb en 2018, dont 51% plutôt et 32% tout à fait. A l’inverse, 16% ne partagent pas cette inquiétude, dont 14% pas vraiment et 2% pas du tout.

Cette inquiétude est présente dans tous les pans de la société et électorats, elle est particulièrement forte (modalité de réponse « oui, tout à fait ») parmi les électeurs d’Éric Zemmour (77%), de Valérie Pécresse (45%) et de Marine Le Pen (43%).

Des Français très inquiets à l’idée qu’il y ait de plus en plus de violences et d’affrontements entre groupes sociaux à l’avenir dans notre pays

91% des Français se disent inquiets à l’idée qu’il y ait plus de violences et d’affrontements entre groupes sociaux à l’avenir dans notre pays, dont 45% très inquiets et 46% plutôt inquiets. A l’inverse, 9% ne sont pas inquiets, dont 7% pas vraiment et 2% pas du tout.

Cette inquiétude est prégnante dans tous les pans de la société et électorats, elle est particulièrement forte (modalité de réponse « très inquiet ») parmi les électeurs d’Éric Zemmour (70%), de Marine Le Pen (62%) et augmente avec l’âge (de 33% chez les 18-34 ans à 56% chez les 65 ans et plus).

Pour les Français, le drame de Crépol « n’est ni un fait divers ni une simple rixe », il représente « la faillite générale » et « l’ensauvagement » d’une société qui « risque de basculer »

Contre « la tentation de la violence et de la vengeance », ils estiment que « c’est à la justice de rendre justice »

Une nette majorité de Français se dit d’accord avec les réactions suivantes prononcées par des personnalités politiques suite au meurtre de Thomas :

  • 78% « ce qui a couté la vie à Thomas n’est ni un fait divers, ni une simple rixe en marge d’un bal de village. C’est un drame qui nous fait courir le risque d’un basculement de notre société si nous ne sommes pas à la hauteur » (Olivier Véran, Porte-parole du Gouvernement)
  • 75% « c’est à la justice de rendre la justice et pas aux Français eux-mêmes et entre eux. La justice permet de ne pas céder à la tentation de la vengeance par la violence » (Olivier Véran, Porte-parole du Gouvernement)
  • 75% « il s’agit là d’une faillite générale de notre société » (Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur)

Ces 3 réactions rencontrent l’assentiment d’une majorité au sein de toutes les catégories de Français et électorats, y compris au sein des électeurs de Jean-Luc Mélenchon (61%, 80%, 65%).

  • 67% « Thomas a été victime de l’ensauvagement de la France » (Eric Ciotti, Président du parti Les Républicains). Cette phrase clive davantage d’un point de vue politique : elle est approuvée par les électeurs de Marine Le Pen (86%) et d’Emmanuel Macron (62%) mais plutôt rejetée par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (66%).

Une courte majorité de Français se dit d’accord avec Marine Le Pen et Eric Zemmour :

  • 58% « fêtes de village, mariages, fêtes d’anniversaire… depuis quelques années, des villages ruraux sont victimes de véritables razzias » (Marine Le Pen)
  • 54% « deux peuples vivent en France, dont l’un doit fuir sans cesse les agressions d’une fraction de plus en plus violente de l’autre, pas seulement les attentats perpétrés aux cris de « Allah Akbar », mais ce véritable djihad du quotidien que subissent les Français. » (Eric Zemmour, Président du parti Reconquête)

Ces deux réactions clivent fortement d’un point de vue politique : elles sont largement approuvées par les électeurs de Marine Le Pen (94%, 90%), d’Éric Zemmour (90%, 92%) et de Valérie Pécresse (66%, 68%) mais sont désapprouvées par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (67%, 73%) et d’Emmanuel Macron (57%, 61%).
Le constat de Marine Le Pen sur « des villages ruraux victimes de véritables razzias » est particulièrement partagé par les habitants des communes rurales (66%).

A contrario, une majorité (57%) n’est pas d’accord avec Eric Coquerel (député La France Insoumise) : « je me méfie de prendre un fait divers, qui est abominable, et à partir de là parler d’aggravation. J’ai un certain âge et je me souviens qu’on a eu beaucoup de ministres de l’Intérieur depuis des décennies qui nous expliquent à chaque fois qu’un cran a été franchi. Malheureusement des rixes de ce type là ça survient. C’est des choses qu’il faut analyser, comprendre mais je ne crois pas que cela s’aggrave en termes de fréquence ». Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon approuvent en majorité Eric Coquerel (65%), le désaccord est majoritaire partout ailleurs.

Recul de l’autorité, laxisme de la justice et violence répandue dans la société : un constat partagé par les Français

Mais loin d’être défaitistes, ils considèrent que l’on peut agir contre la hausse de la violence

  • Le recul de l’autorité est un problème majeur dans la société française : 91% (+6 points depuis le 12 mai 2021) des Français sont d’accord. Une opinion largement majoritaire dans toutes les catégories de population et électorats, et qui s’intensifie avec l’âge (de 76% chez les 18-24 ans à 97% chez les 65 ans et plus). Elle est davantage approuvée par les électeurs de Marine Le Pen (98%) et d’Emmanuel Macron (94%) que par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (77%).
  • La justice est trop laxiste (87% d’accord, +7). Un constat également largement approuvé dans toutes les catégories de population et électorats, et de manière plus forte par les électeurs de Marine Le Pen (99%) et d’Emmanuel Macron (89%) que par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (76%).
  • Les Français considèrent majoritairement que la violence se répand dans toute la société, 58% (+8) sont en désaccord avec la phrase suivante : « c’est faux de dire que la violence se répand dans toute la société, elle n’est le fait que de quelques-uns ». Les 18-24 ans (52% d’accord), les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (53%) et d’Emmanuel Macron (53%) sont une courte majorité à estimer que la violence est le fait de quelques-uns, mais dans toutes les autres tranches d’âge (57%-61% pas d’accord) et pour les électeurs d’Éric Zemmour (73%), de Marine Le Pen (70%), et de Valérie Pécresse (56%) la violence se diffuse.
  • En revanche, les Français sont partagés quant à l’idée que les politiques parlent trop d’insécurité en ce moment (51% d’accord, 48% pas d’accord). Cette affirmation clive fortement d’un point de vue politique : une large majoritéé d’électeurs de Jean-Luc Mélenchon (77%) et dans une moindre mesure d’Emmanuel Macron (61%) sont d’accord tandis que 7 électeurs sur 10 de Marine Le Pen (72%), Eric Zemmour (72%) et de Valérie Pécresse (70%) sont en désaccord.
  • Malgré ces constats, 71% (+1) ne sont pas d’accord avec la phrase suivante : « la violence est inéluctable, quel que soit les moyens que l’on donne à la police et à la justice, on ne peut rien faire contre la hausse de la violence ». Aucune catégorie de population ne se montre défaitiste, le désaccord est majoritaire dans tous les pans de la société et électorats.

Près de 8 Français sur 10 estiment que la situation en matière de sécurité s’est dégradée ces dernières années, une opinion en forte hausse en 1 an

78% des Français (+10 points par rapport au 1er décembre 2022) estiment que la situation en France en matière de sécurité des personnes et des biens se dégrade depuis quelques années, une opinion en progression constante depuis notre mesure d’août 2020 (58%, soit +20).

Pour 19% (-9) elle ne change pas, seuls 3% (-1) considèrent qu’elle s’améliore.

En 1 an, la perception d’une dégradation de la sécurité progresse dans tous les pans de la société (générations, catégories socioprofessionnelles et catégories d’agglomération) et dans tous les électorats.

On observe une hausse particulièrement forte chez les cadres (81%, +22), rejoignant ainsi le niveau des professions intermédiaires (80%, +13) et des employés/ouvriers (74%, =), chez les 65 ans et plus (85%, +15) et politiquement parmi les électeurs d’Emmanuel Macron (69%, +17).

Malgré ces hausses, cette perception demeure toutefois plus élevée chez les électeurs de Valérie Pécresse (95%), de Marine Le Pen (90%) et d’Éric Zemmour (88%) que chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (66%) et d’Emmanuel Macron (69%).

D’un point de vue géographique, elle est très présente et progresse dans les communes rurales (81%, +8), les communes urbaines de province (80%, +13) et est également présente mais reste stable dans l’agglomération parisienne (68%, =).

Les agressions sur les personnes devant les trafics de drogue, les agressions sexuelles et les incivilités sont les sujets sur lesquels le gouvernement devrait agir en priorité

Pour les Français, le gouvernement doit en priorité agir sur : 

  • Les agressions sur les personnes (68%, +7 depuis le 1er décembre 2022), il s’agit de la priorité n°1 au sein de toutes les catégories de population et électorats
  • Les trafics de drogues (53%, +16), un enjeu qui gagne en importance avec l’âge (de 39% chez les 18-34 ans à 68% chez les 65 ans et plus)
  • Les agressions à caractère sexuel ou sexistes (49%, -3), un enjeu particulièrement prioritaire pour les femmes (54%) et pour les moins de 35 ans (61%)
  • Les incivilités comme les dégradations dans l’espace public, nuisances sonores, manque de respect, etc. (41%, +8)

Les agressions sur les personnes, trafics de drogue et incivilités progressent dans tous les catégories de population et électorats

Les autres priorités sont : les piratages informatiques et les vols de données (25%, -7), les chantages, rackets ou escroqueries, y compris sur internet (22%, -2), les cambriolages (18%, -7), les vols à l’arraché dans la rue (13%, -6) et les vols de voiture, de moto ou de vélo (7%, -2).

S’assurer de l’application réelle des peines et durcir le code pénal, en forte hausse en 2 ans, sont les mesures les plus attendues pour agir en matière de sécurité

Pour améliorer la situation en matière de sécurité, les Français estiment que le Gouvernement doit en priorité agir sur le volet judiciaire :

  • S’assurer que les personnes effectuent réellement les peines auxquelles elles ont été condamnées : 56% (+8 points depuis le 3 novembre 2021).
  • Durcir le code pénal (sévérité des peines) : 54% (+9).

Ces deux mesures progressent et sont en tête au sein de toutes les catégories de population et électorats : électeurs de Marine Le Pen (62%, 63%), d’Emmanuel Macron (55%, 51%) et de Jean-Luc Mélenchon (43%, 46%).

Ensuite, les Français préconisent : renforcer la présence policière sur le terrain (37%, +1), augmenter les effectifs de police (29%, =), renforcer les cours d’instruction, morale et civique à l’école (28%, =), construire plus de places de prison (22%, +3), renforcer la vidéosurveillance (19%, =), mieux équiper les policiers et gendarmes (17%, -5), améliorer la formation des policiers (16%, -2), renforcer le renseignement (10%, -4) et armer les policiers municipaux (6%, -1).

Services publics, lutte contre la pauvreté et le chômage : pour une majorité, on en fait pas assez pour les communes rurales comme pour les banlieues

En matière d’aide publique, de présence des services publics, de lutte contre la pauvreté et le chômage, 62% des Français estiment qu’on en fait pas assez pour les communes rurales (31% juste ce qu’il faut, 7% trop) et 51% pour les banlieues, les cités (20% juste ce qu’il faut, 28% trop).

On observe relativement peu de différence selon la catégorie d’agglomération, que ce soit pour les communes rurales (60%-64% on en fait pas assez) et pour les banlieues/cités (50%-54%).

Pour les banlieues/cités, on observe un clivage politique : pour une majorité d’électeurs de Jean-Luc Mélenchon (79% pas assez) et dans une moindre mesure d’Emmanuel Macron (50% pas assez, 27% ce qu’il faut, 22% trop) on en fait pas assez. Les électeurs de Valérie Pécresse (36% trop, 34% pas assez, 30% juste ce qu’il faut) et de Marine Le Pen (44%, 41%, 14%) sont partagés. Les électeurs d’Éric Zemmour considèrent quant à eux qu’on en fait trop (70%).

Une opinion plus consensuelle à l’égard des communes rurales : 7 électeurs sur 10 de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen estiment qu’on en fait pas assez, et 1 électeur sur 2 d’Emmanuel Macron (contre 46% juste ce qu’il faut).

Pour 2 Français sur 3, les actes de violence de l’ultradroite ne sont pas marginaux mais traduisent un phénomène général de la montée de ces groupes dans notre pays

A l’inverse, 33% considèrent que ces actes de violence sont marginaux.

A l’exception des électeurs d’Éric Zemmour qui estiment plutôt que ces actes sont marginaux (61%), l’opinion selon laquelle ils traduisent un phénomène général de montée de l’ultradroite est majoritaire dans toutes les catégories de population et électorats : électeurs de Jean-Luc Mélenchon (75%), d’Emmanuel Macron (75%), de Valérie Pécresse (59%) et de Marine Le Pen (56%).

3 Français sur 4 ont le sentiment que certaines personnalités politiques attisent les manifestations et violences de l’ultradroite

74% des Français estiment que certaines personnalités politiques, par leurs discours et leurs actions, encouragent et attisent ce genre de manifestations et violences de l’ultradroite, dont 40% plutôt et 34% tout à fait. A l’inverse, 25% sont d‘un avis contraire, dont 19% pas vraiment et 6% pas du tout.

Une opinion largement partagée par les électeurs d’Emmanuel Macron (92%), de Jean-Luc Mélenchon (89%) et de Valérie Pécresse (76%) mais qui divise les électeurs de Marine Le Pen (51% oui, 47% non) et d’Éric Zemmour (49%, 50%).


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