Pour l’opinion, le projet de réforme des retraites ne prend pas suffisamment en compte la pénibilité des métiers

6 actifs sur 10 estiment que leur métier est « pénible », un point de vue très fortement exprimé par les ouvriers (85%) et par les classes moyennes (59%)

Dans le détail, 43% le jugent assez pénible et 17% très pénible. A l’inverse, 39% considèrent que leur métier n’est pas pénible, dont 29% pas vraiment et 10% pas du tout.

Cette perception diffère fortement selon la catégorie socio-professionnelle : la plupart des ouvriers (85%) et une majorité des employés (59%) et professions intermédiaires (59%) disent que leur métier est pénible, une opinion qui n’est partagée que par une minorité de cadres (39%).

Pour une large majorité de Français, les personnes exerçant un métier pénible devraient partir plus tôt à la retraite (en moyenne 4 ans)

79% des Français estiment que les personnes qui exercent un métier pénible devraient pouvoir partir plus tôt que les autres à la retraite (4 ans en moyenne : 20% 1 ou 2 ans plus tôt, 20% 3 ou 4 ans, 24% 5 ans et 15% 6 ans ou plus). A l’inverse, 20% des Français considèrent que les personnes exerçant un métier pénible devraient avoir les mêmes règles que tout le monde pour le départ à la retraite.

La nécessité de prendre en compte la pénibilité dans l’âge de départ à la retraite est une opinion partagée dans des proportions similaires au sein de tous les électorats et catégories socio-professionnelles. Toutefois des différences émergent sur l’ampleur de cette prise en compte : pour les électeurs de Jean-Luc Mélenchon, de Marine Le Pen, pour les employés/ouvriers et les professions intermédiaires, les personnes exerçant un métier pénible devraient partir en moyenne 4 ans et demi plus tôt que les autres, contre « seulement » 3 ans et demi pour les électeurs d’Emmanuel Macron, les cadres et les retraités.

L’opinion en faveur de la prise en compte de la pénibilité dans l’âge de départ augmente avec l’âge (de 64% des 18-24 ans à 88% des 65 ans et plus).

Pour l’opinion publique, le projet de réforme des retraites ne prend pas suffisamment en compte la pénibilité des métiers

75% des Français estiment que le projet de réforme des retraites du gouvernement ne prend pas suffisamment en compte la pénibilité des métiers dont 38% pas vraiment et 37% pas du tout. A l’inverse, seuls 15% déclarent qu’elle prend suffisamment compte cette dimension dont 2% tout à fait et 13% plutôt. 1 Français sur 10 ne se prononce pas sur ce sujet.

La critique est majoritaire dans l’ensemble des catégories de la population, y compris chez les électeurs de 1er tour d’Emmanuel Macron (60% non). Elle est particulièrement intense (item « non, pas du tout ») chez les ouvriers (50%), les 35-64 ans (44%), politiquement chez les électeurs de Marine Le Pen (57%) et de Jean-Luc Mélenchon (52%), et chez les Français qui estiment exercer un métier très pénible (57%).

Au-delà des critères de pénibilité qui existent déjà, les Français veulent y ajouter les 4 supprimés en 2017 (postures pénibles, charges lourdes, vibrations, risques chimiques) et le stress

La plupart des Français estiment que les contraintes physiques doivent faire partie des critères de pénibilité permettant de partir plus tôt à la retraite :

  • La manutention (porter ou soutenir) de charges lourdes (91%)
  • Les postures pénibles, maintien des bras en l’air, position à genoux, position fixe de la tête et du cou, posture accroupie, en torsion, etc. (88%)

Une large majorité considère que les conditions de travail « extrêmes » doivent compter comme critères de pénibilité :

  • Les agents chimiques dangereux y compris les poussières et les fumées (86%)
  • Les vibrations mécaniques par outil ou environnement de travail (82%)
  • Les températures extrêmes froid ou chaud (82%)
  • Le travail en milieu hyperbare, sous hautes pressions (80%)

Près de 7 Français sur 10 partagent cette opinion concernant le bruit, les mouvements répétées et les horaires décalées

  • Le travail de nuit (73%)
  • Le bruit (72%)
  • Le travail répétitif, avec des mouvements répétés (70%)
  • Le travail en équipes successives alternantes, comme 3×8, 2×12, etc. (66%)

Enfin, 60% des Français souhaitent que le stress/la pression soit comptée comme un critère de pénibilité.

En moyenne, les Français estiment que 9 items sur 10 doivent être des critères de pénibilité. Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (9/10 en moyenne), de Marine Le Pen (9/10), les 35 ans et plus (9/10) et les actifs qui déclarent exercer un métier pénible (9/10) citent davantage de critères que les électeurs d’Emmanuel Macron (8/10), les 25-34 ans (8/10), les 18-24 ans (7/10) et les actifs qui estiment ne pas exercer ne métier pénible (8/10);

Quelques autres différences sont à noter :

  • Le travail répétitif (83%) et les températures extrêmes (89%) sont particulièrement cités par les ouvriers
  • Le stress est particulièrement évoqué par les 50-64 ans (70%), et politiquement par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (74%) et de Marine Le Pen (66%) mais, à contrario, par une minorité d’électeurs d’Emmanuel Macron (46%)

Le regard de l’Institut Montaigne

« Ce sondage corrobore notamment l’un des points soulevés par notre dernière analyse « Les Français au travail : dépasser les idées reçues ». Les conditions de travail actuelles pèsent bien plus sur le bien-être « psychique » que sur le bien-être physique, la pénibilité physique étant toutefois, et sans surprise, très marquée pour certains secteurs et certains métiers. La pénibilité physique pourrait par ailleurs s’expliquer en partie par la charge psychologique. »


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