Le Conseil Objectivé

Les Français, le budget et la fiscalité

Plus de 7 Français sur 10 ont le sentiment que les impôts et taxes ont augmenté depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, une opinion en forte progression depuis 2 ans

72% des Français estiment que depuis la première élection d’Emmanuel Macron en 2017, les impôts et taxes ont augmenté, dont 44% beaucoup augmenté et 28% un peu augmenté. Cette opinion progresse fortement depuis notre mesure d’octobre 2023 (+14 points sur le total ont augmenté, +10 pts beaucoup augmenté). A l’inverse, 18% (-3) considèrent qu’ils sont restés stables et 10% (-10) qu’ils ont baissé, dont 8% (-10) un peu baissé et 2% (=) beaucoup baissé.
Cette perception est majoritaire dans toutes les catégories de population et électorats. La pression fiscale est particulièrement ressentie par les Français qui doivent se restreindre pour boucler leurs fins de mois (78%) et les électeurs du Rassemblement National (86%) ; et progresse fortement en 2 ans chez les retraités (74%; +25) désormais au même niveau que les actifs (71%, +9).

Le consentement à l’impôt se fragilise, les critiques sur le système fiscal sont au plus haut

Concernant notre système fiscal :

  • 86% des Français estiment que le montant des impôts et taxes n’est pas bien utilisé par les pouvoirs publics, en progression de 5 points depuis le 25 septembre soit le plus haut niveau enregistré depuis le début des mesures Elabe en mai 2023. Un constat largement majoritaire et qui progresse dans tous les électorats et catégories de population
  • Plus de 8 Français sur 10 considèrent que les pouvoirs publics ne luttent pas assez contre la fraude sociale (84%, +7, plus haut niveau) et la fraude fiscale (82%, +5, plus haut niveau), ce constat est partagé et en hausse dans tous les électorats. L’insuffisance de la lutte contre la fraude sociale est plus marquée chez les électeurs RN (93%, +10) que du NFP (73%, +10) mais il est largement majoritaire et progresse dans ces 2 électorats
  • 80% des Français jugent que le système fiscal actuel ne permet pas la redistribution des richesses entre les différentes catégories de la population, en progression de 7 points (plus haut niveau), une opinion largement partagée parmi tous les électorats, elle progresse notamment chez les électeurs du NFP (84%, +17)
  • 51% des Français jugent que le paiement des impôts et taxes est justifié car il finance les services publics, un chiffre en recul de 4 points depuis le 25 septembre et de 10 points depuis mars 2024 pour retrouver son niveau le plus bas. Le consentement à l’impôt reste largement majoritaire chez les électeurs d’Ensemble (77%, -1), les électeurs LR (60%) et chez les électeurs du NFP malgré un net recul (68%, -11). Il est à l’inverse minoritaire et en forte baisse chez les électeurs du RN (32%, -10)
  • Dans le même temps, 51% (+2) estiment que l’ensemble des ménages devrait payer l’impôt sur le revenu, une opinion majoritaire chez les électeurs d’Ensemble (72%) et LR (68%) tandis que les électeurs du RN sont plus partagés (52% d’accord) et ceux du NFP plutôt en désaccord (56% pas d’accord).

Les mesures fiscales adoptées par les députés, essentiellement des hausses d’impôts pour les ménages les plus aisés et grandes entreprises, sont largement approuvées par l’opinion publique

Parmi les mesures adoptées par l’Assemblée nationale dans le volet recettes (impôts) du Budget de l’Etat pour 2026 :

  • 85% des Français sont favorables au doublement de la taxe « Gafam » qui cible les grandes entreprises de la tech (principalement américaines : Google, Amazon, Facebook…), passant de 3 à 6%
  • 82% la prolongation de l’impôt minimal de 20% pour les plus fortunés (revenu supérieur à 250 000€ par an pour une personne seule, 500 000€ pour un couple)
  • 82% les frais d’Ehpad seront désormais éligibles à un crédit d’impôt plutôt qu’à une réduction (les ménages modestes pourront ainsi y bénéficier)
  • 81% la réduction de l’impôt sur les sociétés des petites et moyennes entreprises réalisant jusqu’à 100.000 euros de bénéfice
  • 81% l’instauration d’un impôt minimum de 15% sur les bénéfices des multinationales
  • 80% la prolongation pour un an de la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises réalisant plus de 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires
  • 74% la défiscalisation totale des heures supplémentaires (supprimant le plafond existant de 7.500 euros au-delà duquel les heures supplémentaires sont aujourd’hui fiscalisées)
  • 65% la transformation de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) en impôt sur la fortune improductive, qui élargit l’assiette de l’impôt aux actifs dits « improductifs » comme l’or, les pièces de monnaie, les fonds euros en assurance-vie, les cryptomonnaies, les voitures, les yachts, les avions, meubles, œuvres d’art, etc
  • 63% la création d’une taxe sur les holdings patrimoniales, c’est-à-dire sur les sociétés créées par des ménages pour détenir et gérer leur patrimoine financier (placements, actions, immobilier)
  • 63% la hausse de la taxe sur les rachats d’actions, portée à 33 % contre 8 % actuellement (opération par laquelle une entreprise rachète ses propres actions sur le marché)
  • 62% l’augmentation de la fiscalité sur les revenus du capital (dividendes et plus-values des placements financiers), aussi appelée « flat tax », de 30% à 31,4%
  • 61% la défiscalisation des pensions alimentaires pour ses bénéficiaires (actuellement, les personnes qui versent des pensions alimentaires sont exonérées d’impôts sur ces sommes, tandis que les bénéficiaires en payent s’ils sont imposables, la mesure inverse donc la situation)

Ces mesures sont majoritairement approuvées dans tous les électorats, celles destinées aux grandes entreprises sont particulièrement plébiscitées par les électeurs du NFP. Seuls les électeurs d’Ensemble sont partagés sur 2 mesures : la transformation de l’IFI en impôt sur la fortune improductive (51% favorables) et l’augmentation de la fiscalité sur les revenus du capital (45%).

Pour l’opinion, les députés ont eu raison de rejeter la fiscalisation des indemnités pour les ALD, les hausses d’impôts sur les biocarburants et le gel du barème de l’impôt sur le revenu, mais ont eu tort de rejeter « la taxe Zucman »

Une majorité de Français estime que les députés ont eu raison de rejeter la fiscalisation des indemnités journalières perçues par les patients souffrant d’affections de longue durée (66%), la hausse de la fiscalité pour deux biocarburants B100 et E85 (63%) et le gel du barème de l’impôt sur le revenu (56%). Une opinion majoritaire dans tous les électorats sans écart notable.

A l’inverse, une majorité de Français considère qu’ils ont eu tort de rejeter la « taxe Zucman » (59%). Une mesure plus clivante politiquement : les électeurs du NFP estiment massivement qu’ils ont eu tort (82%) tandis que les électeurs d’Ensemble (55% tort, 43% raison), les électeurs LR (47%, 53%) et du RN (50%, 48%) sont plus partagés.

Des débats budgétaires largement dominés par des enjeux partisans aux yeux des Français

A propos des débats actuels au Parlement autour du Budget de l’Etat pour 2026, 73% des Français estiment qu’ils ne sont pas intéressants, ils sont dominés par des enjeux partisans, c’est surtout de la politique politicienne ; contre 24% qu’ils sont intéressants pour comprendre les choix budgétaires de l’Etat qui auront des conséquences sur le quotidien.

On n’observe aucune différence significative d’un point de vue politique, cette critique est partagée par tous les électorats (entre 71% et 77%).

Alors que les ainés portent un regard particulièrement sévère sur les débats en cours (82% des 50 ans et plus les jugent dominés par des enjeux partisans), les jeunes se montrent, en comparaison, plus intéressés par des décisions qui pourraient entraîner des conséquences sur leur quotidien (46% débats intéressants, 46% pas intéressants).

Dans les débats actuels, aucune des positions des principaux partis à l’Assemblée ne convainc l’opinion en dehors de leurs sympathisants. Le RN a une longueur d’avance sur les autres formations

Dans les débats sur le budget 2026 :

  • 32% des Français estiment que les positions du Rassemblement National vont dans la bonne direction (contre 41% mauvaise direction et 27% n’ont pas d’avis)
  • 20% pour Les Républicains (44% mauvaise, 36% pas d’avis)
  • 20% le Parti Socialiste (48%, 32%)
  • 16% le camp présidentiel (52%, 32%)
  • 15% Les Ecologistes (51%, 34%)
  • 11% La France Insoumise (63%, 26%)

A noter toutefois que les positions des uns et des autres sont approuvées par leurs sympathisants respectifs : 85% des sympathisants RN considèrent que les positions du RN vont dans la bonne direction, 80% des sympathisants de la France Insoumise estiment que les députés LFI vont dans la bonne direction, 77% des sympathisants Les Républicains, 67% des sympathisants du Parti socialiste, 63% des sympathisants des Ecologistes et 58% des sympathisants du camp présidentiel. Mais ces formations politiques peinent à convaincre en dehors de leur socle.

L’opinion commence à douter de la capacité du Premier ministre à trouver une majorité pour faire voter le budget

56% (+4) des Français estiment que le Premier ministre Sébastien Lecornu ne sera pas capable de faire des compromis avec les différentes formations politiques et obtenir une majorité pour faire voter le budget, dont 42% (+5) probablement pas et 14% (-1) certainement pas. A l’inverse, 43% (-4) demeurent optimistes, dont 38% (-3) qu’il y parviendra probablement et 5% (-1) certainement.

En 2 semaines, le doute gagne les électeurs d’Ensemble et dans une moindre mesure du NFP. Au-delà de ces mouvements, l’opinion reste clivée politiquement en 2 blocs : une majorité d’électeurs d’Ensemble (70% oui, -14 points) et LR (65%) pensent que le Premier ministre sera capable de faire voter le budget tandis que les électeurs du RN (67% non) et du NFP (64%, +7) sont plus sceptiques.

6 Français sur 10 attendent des oppositions qu’elles privilégient la recherche de compromis à la censure, une opinion en légère hausse en 2 semaines

Dans les négociations en cours pour constituer un budget pour l’année 2026, 61% (+3 points depuis le 22 octobre) des Français estiment que même s’ils ne sont pas d’accord avec l’ensemble du budget proposé par le gouvernement, les oppositions doivent faire des compromis et ne pas voter la censure pour éviter une instabilité politique et financière. A l’inverse, 37% (-3) considèrent que les oppositions qui sont en désaccord avec le budget proposé par le gouvernement doivent voter la censure même si cela peut provoquer une instabilité politique et potentiellement une crise financière.

D’un point de vue politique, le souhait d’une recherche de compromis est majoritairement souhaité et progresse chez les électeurs LR (85%, +10) et les abstentionnistes (63%, +8). Il reste également largement majoritaire chez les électeurs d’Ensemble malgré une baisse (85%, -5). A contrario, les électeurs du NFP demeurent partagés (50%, stable). Ce souhait est minoritaire et s’effrite chez les électeurs du RN (42%, -3).

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