Les Français partagent le diagnostic alarmant de François Bayrou sur l’économie et les finances du pays, sauf sur la nécessité de travailler plus
Lors d’une conférence de presse organisée ce mardi, le Premier ministre François Bayrou a dressé un certain nombre de constats sur l’état de l’économie et des finances publiques du pays. Les Français approuvent massivement le diagnostic du Premier ministre sur l’excès de dépenses publiques, le surendettement, l’impératif de produire plus et de réindustrialiser le pays :
- « Il y a trop de dépenses publiques » (84% des Français sont d’accord)
- « Notre surendettement menace gravement notre indépendance » (84%)
- « L’excès de dépenses publiques ne fait pas le bonheur des peuples » (82%)
- « La politique de réindustrialisation doit être une obsession pour notre nation » (78%)
- « Nous ne produisons pas assez » (72%)
Des constats largement approuvés au sein de toutes les catégories de la population (sexes, âges, catégorie socio-professionnelles) et parmi tous les électorats, y compris les électeurs du NFP (de 65% à 75% d’accord).
En revanche, 60% des Français ne sont pas d’accord avec le Premier ministre lorsqu’il affirme que « nous ne travaillons pas assez » (contre 39% d’accord).
On observe, sur ce point, un double clivage :
- Entre les retraités (56% d’accord) et les actifs (65% pas d’accord, jusqu’à 76% chez les ouvriers)
- Entre les électeurs du « socle commun » (66% des électeurs d’Ensemble et 57% de droite sont d’accord) et les électeurs du NFP qui désapprouvent massivement (84% pas d’accord). A noter que les électeurs du RN sont quant à eux très partagés (51% pas d’accord, 48% d’accord)
Pour réduire la dette, l’opinion privilégie la baisse des dépenses publiques et du train de vie de l’Etat, et rejette toute augmentation de la fiscalité généralisée et du temps de travail
Pour l’opinion, le premier levier à actionner pour réduire la dette est la diminution du train de vie de l’Etat (75%, 3 réponses possibles parmi 10 items), nettement devant la réduction globale des dépenses publiques (43%), une hausse des impôts pour les entreprises ayant fait le plus de profits (37%), des réformes encourageant la croissance économique (33%), une hausse des impôts des particuliers les plus aisés (31%) et la diminution des dépenses sociales (28%). D’autres pistes ne sont privilégiées que par une petite minorité : l’augmentation du temps de travail (14%), la diminution du financement des collectivités locales par l’Etat (11%), une hausse globale des impôts des entreprises (10%) et une hausse globale des impôts des particuliers (4%).
La diminution du train de vie de l’Etat fait l’objet d’un large consensus d’un point de vue politique, ce moyen arrive largement en tête au sein de tous les électorats.
Pour le reste, des différences émergent :
- Les électeurs du NFP privilégient une hausse d’impôts pour les entreprises ayant fait le plus de profits (57%) et pour les particuliers les plus aisés (52%)
- Les électeurs d’Ensemble et de droite, la réduction globale des dépenses publiques (respectivement 47% et 60%) et des réformes pour encourager la croissance (35% et 39%). A noter que l’augmentation du temps de travail est nettement plus évoquée par ces deux électorats (31% et 23%) que par les autres
- Les électeurs du RN privilégient quant à eux la réduction des dépenses sociales (48%) et la réduction globale des dépenses publiques (48%)
Pour baisser les dépenses publique, l’opinion cible 5 domaines : allocations familiales et chômage, aides aux entreprises, environnement et culture
A noter toutefois que le souhait de baisser les aides aux entreprises recule depuis octobre 2024
Pour les Français, les postes de dépense publique qu’il faudrait réduire en priorité sont : les allocations familiales (35%, 3 réponses possibles parmi 16 items, +3 points depuis le 2 octobre 2024), les allocations chômage (34%, +2), les aides aux entreprises (30%, -6), l’environnement/la transition écologique et énergétique (25%, +3) et la culture (23%, -2). Moins d’1 Français sur 5 cite : la défense/l’armée (16%, -3), les transports (11%, -1), le logement (10%, -1), la lutte contre le terrorisme (10%, +2), la sécurité (6%, -3), l’agriculture (6%, =), la santé (5%, -2), les retraites (5%, -2), la dépendance/le vieillissement (5%, =), la justice (4%, -3) et l’éducation (4%, -1). 13% (+2) des Français estiment qu’il ne faudrait réduire aucun de ces postes de dépense.
Assez nettement devant les autres postes de dépense, les allocations familiales et chômage sont les 2 domaines qu’il faudrait réduire pour les électeurs d’Ensemble, de droite et du RN (avec, pour ces derniers, l’environnement). Les électeurs du NFP se distinguent assez des autres électorats en privilégiant davantage les aides aux entreprises malgré un fort recul depuis octobre (43%, -10) et la défense/l’armée (29%), 19% d’entre eux considèrent qu’il ne faudrait baisser les dépenses sur aucun des postes testés.
Les Français soutiennent les coupes dans les agences de l’Etat et la pérennisation des hausses de fiscalité pour les plus aisés (particuliers comme entreprises) mais rejettent la baisse des pensions de retraite, la réduction du budget pour les collectivités et la différenciation des remboursements des soins selon le revenu
Parmi les mesures envisagées par le gouvernement ou évoquées dans le débat public pour réduire la dette, une large majorité de Français se dit favorable au fait de réduire les dépenses des agences de l’État (86%), à prolonger l’impôt minimal de 20% pour les plus fortunés (84%) et prolonger la taxe sur les grandes entreprises (83%). Ces 3 mesures sont largement soutenues dans tous les électorats.
A contrario, les Français sont massivement opposés à la désindexation des pensions de retraite (78%), à la suppression de l’abattement fiscal pour les retraités (72%), au report de l’âge de départ à la retraite (69%). Et 6 Français sur 10 sont opposés à l’augmentation de la durée de travail hebdomadaire des actifs (63%), la réduction du budget des collectivités locales (63%) et à la différenciation des remboursements des soins et médicaments en fonction des revenus (59%).
Dans le détail :
- L’opposition aux mesures ciblant les pensions de retraite (désindexation, suppression de l’abattement fiscal) est très prégnante chez les retraités (près de 90%), mais moins importante chez les 18-34 ans (6 sur 10)
- Les mesures d’augmentation du temps de travail (durée hebdomadaire, report de l’âge de départ à le retraite) sont désapprouvées par les actifs (par près de 70% d’entre eux) et par les électeurs du NFP (plus de 80%) tandis que les retraités sont partagés (près de 50% opposés) et qu’une courte majorité d’électeurs d’Ensemble et de droite y sont favorables
- Tous les principaux électorats sont opposés à la réduction du budget des collectivités locales, les électeurs du NFP (84%) le sont encore davantage que ceux d’Ensemble, de droite et du RN (52%-59%)
- L’opposition à la différenciation des remboursements des soins selon le revenu est homogène (près de 60%) dans toutes les catégories socio-professionnelles, selon la situation financière en fin de mois et dans tous les principaux électorats
Pas de nouvelles hausses d’impôts : près d’1 Français sur 2 y croit
Le Premier ministre a déclaré qu’« augmenter les prélèvements (impôts et taxes) est une solution qui parait simple mais qui est intenable ». 47% des Français jugent que cette annonce d’absence de nouvelles hausses d’impôts est crédible, dont 32% plutôt crédible et 15% tout à fait crédible. A l’inverse, 53% considèrent que cette annonce n’est pas crédible, dont 40% pas vraiment crédible et 13% pas du tout crédible.
Les électeurs d’Ensemble (57%), de droite (53%), les cadres et professions intermédiaires (55%) et les 18-34 ans (60%) jugent en majorité que cette annonce est crédible. A l’inverse, la majorité des électeurs du RN (58%), du NFP (57%), des employés/ouvriers (57%) et des plus de 34 ans (58%) qu’elle n’est pas crédible.
3 Français sur 4 ne font pas confiance au gouvernement de François Bayrou pour réduire le déficit et avoir une bonne politique en matière de finances et dépenses publiques
75% des Français ne font pas confiance au gouvernement de François Bayrou pour réduire le déficit et avoir une bonne politique en matière de finances et dépenses publiques, dont 41% pas vraiment confiance et 34% pas du tout confiance. A l’inverse, 24% font confiance au gouvernement, dont 21% plutôt confiance et 3% tout à fait confiance.
Le gouvernement fait face à une défiance majoritaire au sein des électorats d’opposition (85% RN, 84% NFP) mais aussi dans l’électorat d’Ensemble (53%) et de droite (66%).
2 Français sur 3 pensent que le gouvernement ne parviendra pas à éviter la censure sur le budget
67% des Français pensent que François Bayrou et son gouvernement ne seront pas capables de faire des compromis avec les différentes formations politiques pour faire voter le budget pour l’année à venir et éviter la motion de censure, dont 44% probablement pas et 23% certainement pas. A l’inverse, 32% pensent qu’il y parviendra, dont 29% probablement et 3% certainement.
Les électeurs d’Ensemble sont partagés (51% oui, 48% non), les autres électorats sont pessimistes : électeurs du NFP (74% non), du RN (73%) et dans une moindre mesure les électeurs de droite (58%).
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