Les syndicats sont désormais plutôt perçus comme des éléments de dialogue de la société mais leur capacité à faire bouger les lignes reste discutée

Les syndicats de salariés sont désormais plutôt perçus comme des éléments de dialogue (52%, +12 depuis janvier 2020) que de blocage (46%, -13)

52% des Français estiment que les syndicats de salariés sont plutôt un élément de dialogue de la société française, une perception en nette hausse (+12 points) par rapport à notre mesure du 16 janvier 2020 réalisée lors du mouvement social contre la réforme des retraites d’Edouard Philippe. A l’inverse, 46% (-13) les voient plutôt comme un élément de blocage.

La perception positive est devenue majoritaire au sein de toutes les catégories de population, hormis chez les retraités qui conservent majoritairement un jugement négatif (53% blocage, -16) malgré une baisse importante.

D’un point de vue politique :

  • Pour une nette majorité des sympathisants de gauche, les syndicats de salariés sont avant tout un élément de dialogue (71%, +15)
  • Malgré une baisse par rapport au mouvement social de janvier 2020, les syndicats de salariés sont toujours perçus comme étant des éléments de blocage (66%, -21) pour les sympathisants LREM
  • Les sympathisants du Rassemblement National restent assez partagés (50%, +5 un élément dialogue contre 48%, -5 un élément de blocage)

Plus de 2 Français sur 5 ne font confiance à aucun syndicat pour améliorer la situation des salariés

La CGT (29%, +8) et la CFDT (29%, +3) devancent les autres syndicats

Pour améliorer la situation des salariés, aucun des syndicats n’obtient la confiance de 43% des Français. Parmi les syndicats cités, le duo CGT (29%, +8 points par rapport au 16 janvier 2020) et CFDT (29%, +3) devancent nettement les autres. FO est citée par moins d’1 Français sur 5 (16%, +2) tandis que les autres syndicats par 1 Français sur 10 ou moins : la CFTC (10% des citations, +2), SUD (8%, +2), l’UNSA (5%, -4), la CFE-CGC (5%, -1).

La distance envers les syndicats est relativement homogène au sein de toutes les catégories de population : 40% des salariés et 39% des retraités ne font confiance à aucun d’entre eux. Cette distance est particulièrement forte chez les femmes (48%) et les 35-49 ans (50%), et est moins prononcée chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (27%).

La confiance envers la CGT pour améliorer la situation des salariés est en hausse dans l’ensemble de la population, et de manière particulièrement importante chez les 50-64 ans (35%, +12), les employés/ouvriers (35%, +7) et les sympathisants de gauche (51%, +10).

La CFDT est plutôt soutenue par les retraités (36% des citations) et les sympathisants de droite (47%, +16).

L’action des syndicats de salariés est plutôt jugée efficace au sein des entreprises mais pas au niveau national

55% des Français considèrent que l’action des syndicats de salariés est efficace au sein des entreprises, mais ils sont 64% à la juger pas efficace au niveau national.

Les salariés (56% efficace au sein des entreprises ; 61% pas efficace au niveau national), qu’ils soient salariés du privé (56% – 60%) comme du public (59% – 63%), partagent l’opinion de l’ensemble des Français.

On observe dans le détail des résultats relativement homogènes d’un point de vue socio-professionnel, seule différence notable les employés/ouvriers sont légèrement moins sévères sur le manque d’efficacité au niveau national (55% pas efficace).

Politiquement, les électeurs de Jean-Luc Mélenchon jugent majoritairement les syndicats de salariés efficaces dans les entreprises (77% efficace) et au niveau national (56% efficace).

Les électeurs de Marine Le Pen reconnaissent une certaine efficacité dans les entreprises (57% efficace) mais moins au niveau national (59% pas efficace).
Les électeurs d’Emmanuel Macron sont beaucoup plus partagés dans les entreprises (51% efficace, 49% pas efficace) et plutôt critiques quant à l’action des syndicats dans le pays (75% pas efficace).

Des Français sceptiques sur l’efficacité des modes d’actions pour influer les décisions politiques

Les Français rejettent les actions violentes, les négociations jugées plus efficaces

Pour avoir un impact sur la décision politique, une majorité de Français juge pas efficaces les manifestations violentes (76%), les pétitions (66%), les buzz sur les réseaux sociaux (65%) et les manifestations « traditionnelles » dans la rue (56%).

L’opinion est beaucoup plus partagée concernant les grèves (51% pas efficaces, 48% efficaces).

A l’inverse, une courte majorité de Français (53%) estime que les négociations représentent un mode d’action efficace pour impacter une décision politique.

Les manifestations, les pétitions, les buzz sur les réseaux sociaux et les manifestations traditionnelles sont perçues comme des modes d’action pas efficace par une majorité au sein de tous les segments de la population et électorats, à l’exception des manifestations traditionnelles auprès des électeurs de Jean-Luc Mélenchon (58% efficaces). A noter que plus de 4 jeunes sur 10 (45% des moins de 35 ans) considèrent que les buzz sur les réseaux sociaux sont un moyen efficace pour faire bouger les lignes.

Les grèves sont à l’origine d’un clivage politique et socio-professionnel : les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (69% efficaces), de Marine Le Pen (56%), les salariés (56%), et plus particulièrement les employés/ouvriers (58%), estiment en majorité que ce mode d’action est efficace, tandis que les électeurs d’Emmanuel Macron (67% pas efficaces) et les retraités (57%) sont plus sceptiques.

Les négociations font relativement consensus dans l’opinion, elles sont majoritairement jugées efficaces par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (62%), d’Emmanuel Macron (61%), de Marine Le Pen (57%), par les retraités (58%) et les actifs (54%).

Le regard de l’Institut Montaigne :

Ces résultats traduisent une évolution notable de la perception des syndicats à la faveur des évènements de ces dernières semaines : au-delà du soutien ponctuel envers les mobilisations, la perception générale des syndicats évolue : ils sont désormais majoritairement perçus comme des éléments de dialogue et non plus comme des éléments de blocage.

Ces chiffres déjouent certains commentaires récurrents, qui ont refait surface fin 2022 lors des grèves catégorielles et spontanées qui contournaient l’action syndicale (grèves des contrôleurs SNCF notamment). Ces mobilisations, qui émergeaient en dehors des circuits syndicaux traditionnels, interrogeaient l’avenir du syndicalisme. La dynamique est aujourd’hui inversée.

Deux nuances néanmoins : aucun des 7 principaux syndicats n’obtient la confiance de plus d’un tiers des interrogés, et l’efficacité perçue reste faible au niveau national. Le “stress test” de la réforme des retraites ouvre, quoi qu’il en soit, des perspectives pour les syndicats, dont ils doivent impérativement se saisir.

Ces éléments seront développés dans une note de l’Institut Montaigne dédiée aux corps intermédiaires et à leurs mutations, à paraître prochainement.

Télécharger le rapport : Les Français et les syndicats de salariés

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