L’idéal-type du « citoyen du monde » est fortuné si l’on en juge le niveau de vie des quelque 0,01% de collectionneurs de passeports et de nationalités. Faisant à la fois office de « laissez-passer », de « passe droit » et de carte Platinum, le passeport serait devenu un bien de luxe, à l’encontre de toute conception universaliste de la citoyenneté. Sa marchandisation révèlerait au contraire une profonde inégalité de droits entre une minorité ultra-privilégiée et les plus pauvres. Dans son ouvrage Citoyennetés à vendre, la journaliste Atossa Araxia Abrahamian dénonce le marché surréaliste auquel se livrent les Comores et les Emirats arabes unis : plutôt que d’offrir la nationalité émiratie aux 4000 familles bidoun résidant sur leur sol (apatrides et sans-papiers), les Emirats achètent celle des Comores pour 200 millions de dollars annuels. Pour le gouvernement comorien, le but de l’opération est limpide : renflouer les caisses de l’Etat grâce à une loi autorisant la vente de sa nationalité au plus offrant. Une privatisation des Etats qui laisse augurer un sombre avenir pour les droits de l’homme.
A lire dans Télérama.