Les Français face à la Covid-19

Une crise sanitaire et économique qui renforce le sentiment d’inégalités

Les Français n’ont pas tous été touchés de la même façon par la crise que nous traversons. Une incertitude teintée de pessimisme semble dominer les perspectives futures, avec cependant des visions parfois différentes, notamment selon l’âge ou les conditions de vie.

Hors du contexte spécifique de la crise de la Covid-19, les Français sont une majorité à trouver notre société injuste (76%). Cette proportion est stable tout au long de la crise (étude Elabe du mois de juin 2020) et même avant (78% dans le « Baromètre des territoires », terrain réalisé entre le 14 décembre 2018 et le 8 janvier 2019). Cette perception d’une société injuste est plus marquée auprès des personnes ayant des difficultés à boucler leurs fins de mois (82% d’entre eux trouvent la société injuste).

Dans le cadre plus spécifique de la crise, cette idée d’inégalité générale au sein de la société est assortie d’un fort sentiment d’inégalité dans les conséquences de la Covid-19, notamment économiques (78%, 84% chez les femmes). Les aspects sanitaires sont un peu moins sujets à ce sentiment d’inégalité, avec cependant un peu plus de la moitié des Français qui considèrent que nous ne sommes pas égaux face au risque de contamination (53%) et dans l’accès aux soins (53%, 45% au sein des agglomérations de plus de 100. 000 habitants). Ainsi il apparait que la crise de la Covid-19, loin d’atténuer les fractures sociales mais aussi territoriales, vient plutôt renforcer ce sentiment d’inégalités, notamment s’agissant de l’accès inégal aux soins et aux dispositifs de soutien économique.

Un pessimisme marqué pour l’avenir de la société, particulièrement au sein des populations moins favorisées

La sortie de crise est envisagée pour 2022 au plus tôt par 56% des Français, soit 9 points de plus qu’en février. Ils sont même 22% à considérer que nous ne retrouverons pas une vie normale. La perspective d’une sortie rapide de la crise de la Covid-19 s’est définitivement éloignée pour une large majorité de la population.

Pour 42% des Français (52% pour les personnes en situation financière tendue) les inégalités sociales seront aggravées par la crise, 32% partagent ce sentiment pour l’avenir du vivre-ensemble. C’est donc le portrait d’une France plurielle qui se dessine dans ces projections, avec des groupes déjà fragilisés avant la crise qui voient s’éloigner la perspective d’amélioration de leur condition. De fait, trois quarts des Français pensent que cette période a renforcé les fractures dans le pays, soit une hausse de 22 points depuis juin 2020.

Le risque d’un ressentiment générationnel ?

La crise n’est pas tout à fait perçue de la même façon selon l’âge. De plus les mesures ciblant des générations spécifiques ne sont pas jugées de la même façon. Ainsi les personnes âgées sont perçues (et se perçoivent) comme ayant bénéficié d’une bonne prise en charge, là où les mesures à destination des jeunes sont jugées plus sévèrement.

Une majorité des Français considère que la société a fait ce qu’il fallait pour les personnes âgées (63%, 71% chez les 65 ans et plus). Ces mêmes personnes âgées sont celles qui affichent les plus hauts niveaux de fierté vis-à-vis de notre système de santé. C’est donc tout autant la société dans sont ensemble que les premiers concernés qui considèrent que les personnes âgées ont été au cœur des priorités dans la gestion de la crise.

Pour ce qui est des jeunes, seul un tiers de Français juge que la société a fait ce qu’il fallait pour les accompagner face à la crise (35%, 46% chez les 65 ans et plus, 32% chez les 18-24 ans). L’idée d’une certaine défaillance de la société face aux besoins des jeunes domine.

Malgré tout, les jeunes font preuve d’un optimisme plus marqué que le reste de la société. Ainsi, ils sont un tiers à penser que la période a permis de renforcer l’unité dans le pays (contre 22% pour l’ensemble des Français). De même, pour chaque dimension de la société testée dans cette étude (solidarité entre les générations, cohésion sociale, éducation…), ils sont plus nombreux à penser que la société post-Covid évoluera dans le bon sens.  Malgré les difficultés, c’est donc l’image d’une génération qui garde des perspectives pour elle-même et pour le reste de la société qui se dessine.

Un jugement mitigé de la réaction de la société face à la Covid-19,mais une fierté à l’égard du système de santé préservée

Le sentiment de fierté nationale n’est pas homogène entre les différentes thématiques évaluées. Si les éléments constitutifs de notre modèle social font l’objet d’un jugement positif, les Français ne se montrent pas particulièrement fier de la France dans sa gestion de crise, surtout en comparaison des autres pays,

Certaines institutions clés dans la lutte contre l’épidémie et ses conséquences  sont source de fierté, en particulier le système de santé pour 68% des Français (plus fort chez les personnes de plus de 65 ans). Le modèle social de notre pays est quant à lui source de fierté pour une courte majorité de Français (55%), mais seulement pour 43 % des personnes en situation financière, signe d’une prise en charge imparfaite des situations de précarité économique et sociale.

La réaction de la France, et plus spécifiquement la comparaison avec la gestion des autres pays, ne sont source de fierté que pour 4 Français sur 10. Le jugement le plus sévère est celui portant sur les comportements des citoyens, avec 68% des Français affirmant ne pas être fiers de leurs compatriotes dans le cadre de la crise de la Covid-19.

Cependant, malgré les difficultés et les angoisses générées par cette crise sanitaire et économique, les Français restent une majorité à penser que toutes ces difficultés ne doivent pas nous empêcher d’agir pour l’avenir. Ainsi, la moitié d’entre eux affirment que si la crise constitue bien une difficulté à prendre en compte, elle ne nous immobilise pas complètement. Ils sont même un quart à penser que cette situation peut être l’opportunité d’une accélération des transformations.

C’est finalement une image contrastée de la société et de son devenir qui se dessine. De façon assez évidente, la crise de la Covid-19 n’a pas touché tous les Français de la même façon. Les grands déterminants socio-économiques (revenu, genre, lieu de vie, …) changent la perception de cette période, et de ses suites. Ces différences ressortent fortement dans la perception des mesures de soutien mises en place et des perspectives d’avenir pour la société française.

 

Une vaccination souhaitée par une courte majorité de Français, avec une part toujours importante de réfractaires et un jugement sévère du rythme de vaccination

Si plus de la moitié des Français souhaite se faire vacciner ou a déjà reçu une première dose, 34% restent réfractaire, dont 22% qui affirment ne pas du tout avoir l’intention de se faire vacciner. Les raisons pour se faire vacciner sont multiples, tout comme celles poussant à refuser le vaccin.

Pour 62% des Français désireux de recevoir le vaccin contre la Covid-19, il s’agit de la seule solution pour sortir de la crise. Ils sont également la moitié à penser que le vaccin est la seule protection contre la maladie. La posture altruiste, à savoir de se faire vacciner pour protéger les autres, n’est citée que par un tiers des Français. Ce dernier point peut être lié à l’incertitude quant aux effets du vaccin su la contagiosité.

Concernant les réfractaires, la raison la plus citée pour expliquer cette posture est le manque de recul quant à la maladie et au vaccin (61%). Les doutes sur les effets secondaires et l’efficacité arrivent à peu près à égalité, en étant cités par la moitié des réfractaires. Le manque de confiance à l’égard des laboratoires pharmaceutiques quant à lui concerne 40% d’entre eux.

Finalement, face à la question du rythme de vaccination, les trois quarts de Français perçoivent celui-ci trop lent, portant ainsi un jugement assez sévère de la gestion de la campagne par le gouvernement. Cette perception peut certainement impacter la perspective de sortie de crise, dont la date s’éloigne pour de plus en plus de Français.

La vaccination est un enjeu crucial de la sortie de crise. Si la moitié des Français restent favorables à l’idée de se faire vacciner, un tiers d’entre eux restent réfractaire, une part qui s’est stabilisée au mois de mars après avoir fortement baissé. La perception d’une campagne de vaccination trop lente, ajoutée aux hésitations sur l’innocuité de certains vaccins, risquent de conforter une partie de la population dans sa prise de distance face au vaccin.

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Crédits image : Pixabay / PIRO4D