A l’exception de l’IFI, les Français estiment que la fiscalité du patrimoine est trop élevée
Invités à se prononcer sur leur perception du niveau de neuf impôts et taxes, une majorité de Français interrogés par Elabe pour Les Echos juge trop élevés les droits de succession (71%), la taxe foncière (67%), les droits de donation (65%), la TVA (64%) et l’impôt sur le revenu (60%)
Une proportion moindre de Français partage ce jugement sur les impôts appliqués aux plus-values immobilières (50% trop élevés, contre 35% au bon niveau, 13% pas assez élevés), les impôts sur les loyers perçus (47%, 41%, 11%) et les impôts sur les placements financiers (46%, 38%, 14%).
A contrario, 44% des Français jugent que le niveau de l’IFI n’est pas assez élevé, 33% au bon niveau, contre 22% trop élevé.
On ne relève pas de différence significative selon la catégorie socioprofessionnelle ou la situation financière.
L’impôt sur le revenu est jugé trop élevé par les Français qui le paient (65%) mais aussi, certes dans une moindre mesure, par ceux qui n’y sont pas assujettis (53%).
L’appréciation du niveau de la fiscalité dépend avant tout de l’orientation politique :
- Les électeurs du Rassemblement national sont particulièrement nombreux à juger que le niveau de ces impôts et taxes est excessif (environ 10 points supérieur à la moyenne des Français)
- Les électeurs du NFP sont moins nombreux à les juger trop élevés (10 à 15 points de moins que la moyenne des Français), une majorité d’entre eux considère que l’IFI n’est pas assez élevé (68%) et sont partagés sur la fiscalité des loyers perçus (49% bon niveau), des placements financiers (37% bon niveau, 33% pas assez élevé, 28% trop élevé) et des plus-values immobilières (37%, 23%, 38%)
- Les électeurs d’Ensemble oscillent entre une fiscalité au bon niveau (loyers, produits financiers, IFI, TVA et plus-values immobilières) et un niveau trop élevé (successions, donations, taxe foncière, IR)
Au-delà de ces écarts, il est intéressant d’observer que les droits de succession sont la forme d’imposition qui est jugée la plus excessive au sein de tous les électorats (89% RN, 62% Ensemble, 58% NFP) et l’IFI la moins excessive (les électeurs du NFP et du RN pensent plutôt qu’il n’est pas assez élevé, les électeurs d’Ensemble au bon niveau).
La fiscalité du patrimoine est perçue par les Français comme incompréhensible, injuste et inefficace
Pour une large majorité de Français, la fiscalité du patrimoine n’est pas lisible, pas facile à comprendre (79%), elle comprend trop d’exceptions, de niches fiscales (76%), elle n’est pas efficace pour encourager l’investissement et l’activité économique (76%), elle pousse certaines personnes à transférer leur patrimoine ou leur résidence fiscale à l’étranger (75%), elle ne contribue pas à réduire les inégalités (73%), elle n’est pas juste, chacun ne contribue pas de manière équitable à hauteur de son patrimoine (73%), elle n’est pas cohérente et ne traite pas de manière similaire les patrimoines comparables (69%) et n’est pas prévisible, elle ne permet pas d’anticiper facilement ce que l’on devra payer (62%).
Si le niveau de la fiscalité du patrimoine connait des différences selon les électorats, ces critiques adressées sur le manque de lisibilité, d’équité et d’efficacité sont largement partagés et majoritaires dans tous les électorats.
L’opinion favorable à une hausse de la fiscalité pour les hauts patrimoines et opposée à l’abaissement du plafond du livret A
Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), qui dépend de la Cour des comptes, a publié un rapport proposant des mesures pour réformer la fiscalité du patrimoine en France. Sur 10 mesures testées, une majorité de Français est favorable à :
- Baisser les frais de notaire lors des achats immobiliers (85%)
- Créer un impôt pour les très hauts patrimoines, à taux modéré, qui s’appliquerait à l’ensemble de leur fortune personnelle (75%)
- Réduire le droit de partage de 2,5% à 1,1% (74%)
- Limiter certains avantages fiscaux lors de la transmission d’entreprises, en les réservant aux entreprises véritablement familiales, en exigeant des engagements plus longs et en réduisant le niveau d’exonération (74%)
- Imposer davantage les revenus conservés durablement dans des holdings contrôlées par un petit nombre de personnes (73%)
- Créer une contribution spécifique sur les très hauts patrimoines lors des successions ou donations (73%)
- Aligner davantage la fiscalité des locations meublées sur celle des locations nues (69%)
- Réduire le poids de la réserve héréditaire pour donner plus de liberté aux donateurs dans leur testament (63%)
Ces mesures sont largement approuvées au sein de tous les électorats.
En revanche, plus de 6 Français sur 10 sont opposés à :
- Abaisser le plafond des livrets règlementés (comme le livret A) et imposer tout dépôt au-delà comme un placement financier (69%)
- Aligner la fiscalité des sommes transmises via assurance-vie sur les règles classiques des successions (62%)
L’abaissement du plafond des livrets règlementés rencontre une opposition majoritaire au sein de tous les électorats (71% RN, 70% NFP, 69% Ensemble). L’alignement de la fiscalité de l’assurance-vie sur les règles classiques des successions est rejeté par les électeurs du RN (73%) et d’Ensemble (65%) tandis que les électeurs du NFP sont plus partagés (49% favorables, 49% opposés).
Elargir ou réduire l’assiette ? L’opinion a une légère préférence pour taxer moins de biens et placements avec des taux d’imposition plus élevés pour les hauts patrimoines
En matière de fiscalité du patrimoine, 46% des Français considèrent qu’il faudrait taxer moins de biens et placements (« réduire l’assiette ») mais avec des taux d’imposition plus élevés notamment pour les hauts patrimoines, contre 36% qu’il faudrait taxer un plus grand nombre de biens et placements (« élargir l’assiette »), mais avec des taux d’imposition plus faibles pour la plupart des ménages. 16% considèrent que la meilleure solution est de ne rien changer au système actuel.
D’un point de vue politique, une majorité (absolue ou relative) d’électeurs du NFP (58% réduire l’assiette), du RN (50% réduire, 34% élargir) et d’Ensemble (47%, 33%) privilégient une réduction de l’assiette tandis que les électeurs de droite préfèrent l’élargir (54%).
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